[1832] Une visite chez Mr Grenville
Le 28 octobre 1832, Darwin part à cheval jusqu'aux faubourgs de Montevideo, en Uruguay. Accompagné de Mr. Hamond, ils vont dîner chez Mr. Grenville, un ressortissant anglais qui a fait fortune en Amérique du Sud et et vit désormais dans sa vaste estancia. Mais qui est ce membre de la diaspora anglaise présente en Uruguay au début du XIXème siècle ?
En abordant la demeure de Mr Grenville au détours d'une haie d'agaves et de cactus, rien ne révèle les origines modestes de son propriétaire. Cette belle estancia est entourée de grands vergers de pêchers, cognassiers, pommiers, figuiers, citronniers et orangers. Des vignes se rajoutent au tableau. Nous sommes pourtant chez un authentique gentleman aventurier du début du XIXème siècle. Notre hôte servit sous le drapeau brésilien, rejoignant Lord Cochrane lorsque ce dernier se mit au service des indépendantistes contre la couronne portugaise. Mr Grenville commanda même une frégate brésilienne et et prit part à de vaillants combats.
Désormais gentleman-fermier en Uruguay, il vit des jours paisibles grâce aux revenus de sa propriété. Il semblerait que ses anciens faits d'armes du côté des brésiliens ne dérange en rien les autorités locales. Et ce malgré la guerre d'indépendance contre le Brésil qui eut lieu quatre années auparavant. Remarque sexiste, Darwin rapporte dans son Journal de Bord qu'il a épousé une belle espagnole et, « ce qui est rare, femme d'intérieur ». Mais il est évident que derrière cette expression se cache un tout autre rôle que celui de femme au foyer en charge des tâches ménagères, comme nous le comprenons aujourd'hui. Darwin souhaite certainement souligner les qualités d'hôtesse de Mme Grenville. Comprenez le sens convenu de l'hospitalité, le charme d'une maison élégante, les manières délicates et discrètes d'une femme bourgeoise de la bonne société. Pour résumer, tout l'art de recevoir à l'anglaise.
Les "dinner parties" sont pour les anglais de véritables rendez-vous sociaux, durant lesquels il convient de se montrer sous son meilleur jour auprès des convives de son rang. L'état du foyer, l'attention apportée à la table, mais aussi le "bel esprit" pour reprendre l'expression du XVIIIe siècle, comptent comme de précieuses qualités. Le compliment formulé par Darwin, bien que fort désobligeant pour la bonne société latine, résume en quelque mots toutes ces qualités.
Image d'illustration (Bing IA) |
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