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Affichage des articles du 2022

[1831] Darwin et la traversée de la Baie de Biscaye

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En cette fin d'année 1831, le HMS Beagle vogue en direction de l'archipel de Madère. La voie maritime la plus évidente au départ de Plymouth consiste à rejoindre la mer d'Iroise après avoir vogué sur la Manche, puis cap au Sud le long du Golfe de Gascogne. Ce célèbre golfe comprend une portion limitée de l'océan Atlantique, de la pointe de Penmarc'h au Nord jusqu'au cap Ortegal au Sud. Sa superficie totale est de 223.000 km² et comprend une marge continentale passive marquant la transition entre croûte continentale Eurasienne et croûte océanique Atlantique. Cette étendue marine, que nous connaissons comme Golfe de Gascogne, porte bien des noms différents. C'est la Baie de Biscaye des anglais, le Bizkaiko golkoa des Basques, ou plus sobrement Ar golf en Breton (mais aussi  Pleg-mor Gwaskogn ). Bay of Biscay - peinture à l'huile par Henry Redmore (1820–1887). Photo credit: Rotherham Heritage Services. A l'époque de Darwin, les connaissances géologi

[1831] Le 27 décembre, "c'est une belle journée" pour débuter un voyage historique !

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Le 27 décembre 1831, le HMS Beagle prend enfin la mer. Cette fois-ci, c'est pour de bon ! Les vents de Sud-Ouest ont tourné en vents d'Est, l'occasion tant attendue se présente enfin. Heureusement pour le capitaine, le comportement anarchique des marins au 26 décembre (lendemain de jour de Noël) a pu être maté par la mise au fer des éléments perturbateurs. Les plus fortes têtes recevront des coups de fouet le 28 décembre . Mais en attendant, tout l'équipage est à son poste pour le grand départ. Le HMS Beagle lève l'ancre à 11 heures. D'après Darwin, il n'était alors plus au  mouillage dans la baie de Plymouth Sound  mais à quai au port de Plymouth pour le jour de Noël. Dans son entrée du 27 décembre (rédigée le 5 janvier 1832), il raconte comment le brick-sloop dut tirer des bordées pour quitter le port. Cette version des faits est contestée par les Narratives de FitzRoy, qui relate pour sa part : " Nous avons quitté notre retraite abritée et pittore

[1831] Un Noël à bord du Beagle

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Le 25 décembre 1831, jour de Noël à Plymouth. Le HMS Beagle n'est toujours pas parti, et ce après plusieurs faux départs. Darwin s'impatiente. Le matin de Noël, il se rend à l'église. Le prédicateur n'est autre que Hoare, un ami de Cambridge. L'après-midi à 4 heures, dîner avec les aspirants depuis leur poste accolé au mât principal du navire. S'il apprécie leur compagnie, il ne peut que se féliciter de vivre relativement isolé dans la salle des cartes de la dunette, avec pour seul voisin le capitaine FitzRoy. Marins de la Royal Navy du début du XIXe siècle chantant pendant qu'ils ne sont pas en service. Illustration de George Cruikshank, 1841. La promiscuité des aspirants dans cet espace aux dimensions restreintes, les inévitables tensions qui règnent entre eux (rappelons que tous sont en compétition pour leurs épreuves finales et leurs futures affectations en tant que lieutenants de la Royal Navy ) pèsent tout de même sur l'ambiance en leur compagnie.

[1831] La série noire des faux départs continue

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Que de faux départs en ce mois de décembre 1831 ! J'avais déjà traité de la tentative de prendre le large du 10 décembre 1831 , qui se solda par un tel mauvais temps dans la Manche que le capitaine FitzRoy avait donné l'ordre de retourner mouiller dans la baie de Plymouth le lendemain 11 décembre. La série noire continue le 15 décembre 1831 avec un fort vent de Sud-Ouest, qui décourage le HMS Beagle de quitter son havre de mouillage. Un an plus tard, alors que le brick-sloop fait voile vers la Terre de Feu, Darwin se remémora l'épisode tandis que sifflait un vent de Sud-Ouest depuis la Patagonie.  Promenade du 17 décembre 1831 et découverte d'un brick échoué suite au mauvais temps à Ramehead Le 17 décembre 1831, promenade avec le second Lieutenant Sulivan et l'Aspirant King jusqu'à Ramehead. En chemin, visite de Cawsand, petit village de pêcheurs aux pittoresques ruelles tordues. Le vent de Sud-Ouest a ramené jusqu'aux falaises de Ramehead un brick qui avai

« Ma nomination reçut l'approbation de l'Amirauté » Darwin était bien le naturaliste officiel du HMS Beagle, et non simple compagnon de voyage du capitaine FitzRoy

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Quel était le rôle exact de Darwin à bord du HMS Beagle  ? La plupart des ouvrages de vulgarisation sont confus sur le sujet. Si certains le présentent comme le naturaliste officiel de l'expédition, d'autres ont tendance à présenter le jeune homme comme le compagnon de voyage du capitaine FitzRoy. Et pourtant, Darwin fut bel et bien le naturaliste officiel du HMS Beagle , approuvé par l'Amirauté avant même que le brick-sloop ne quitte Plymouth le 27 décembre 1831. Alors d'où provient le doute, et peut-on y répondre ? En 2013, l'historien John van Wyhe (2013) apportait dans son article de recherche 1 une réponse claire à ce dilemme. Et si je reprends dans ce billet le titre de son article, c'est pour souligner tout comme lui qu'il n'existe nulle ambiguïté sur le rôle joué par Darwin à bord du Beagle . Le HMS Beagle dans les eaux de la Terre de Feu, salué par les autochtones fuégiens. Peinture de Conrad Martens (artiste officiel à bord du Beagle de 1831

[1831] Récit d'un faux départ pour raisons météorologiques

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Le 10 décembre 1831, le capitaine FitzRoy tente un départ pour l'expédition. Les conditions météorologiques s'améliorent favorablement. Tôt le matin, des torrents de pluie s'abattent sur Plymouth. Mais le ciel se dégage enfin et un léger vent de Sud-Ouest souffle dans la baie. FitzRoy avait fait savoir la veille à l'équipage qu'en cas d'amélioration de la météo, il tenterait un départ au matin. A 9 heures, le HMS Beagle lève l'ancre. Erasmus (frère de Darwin) est à bord pour lui faire ses adieux. Il débarque au Môle et le brick-sloop reprend sa route. Mais dès que la protection de la barre rocheuse artificielle est franchie, la mer moutonne. Darwin ne tarde pas à avoir le mal de mer. Pire encore, le soir venu, le baromètre annonce un coup de tabac ! La mer se déchaîne et le navire tangue fortement. "La rafale", tableau de Willem Van de Velde (le Jeune), vers 1680. Toute la nuit, et aussi durant la journée du 11 décembre 1831, le mauvais temps s&#

Le Pays de Galles, premier voyage naturaliste de Charles Darwin avant le Beagle

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Bien que cet épisode soit largement moins connu que le célèbre voyage autour du monde à bord du HMS Beagle (1831-1836), Charles Darwin entreprit durant l'été 1831 une toute première expédition naturaliste au Pays de Galles. Il s'agissait alors, pour le jeune diplômé du Christ's College de Cambridge, d'accompagner sur le terrain le Pr. Sedgwick, géologue de son état. Si cette expédition fut d'assez courte durée, elle fut sur le plan scientifique particulièrement formatrice pour Charles Darwin, qui fit alors ses premières armes en tant que géologue de terrain. Géologie du Nord du Pays de Galles (Reynolds, 1860, 1889 ; Woodward, 1904), avec le tracé de l'expédition de Sedgwick & Darwin (1831) d'après Roberts (2001). Ce récit commence par un retard de rentrée universitaire. Le jeune Darwin aurait dû débuter ses études au Christ's College de Cambridge dès la fin de l'été 1827. Cependant, il ne débuta ses études de théologie qu'après Noël, car il

[1831] Le mal de mer, principal ennemi de Darwin

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Si un élément vint en partie gâcher le voyage de Darwin à bord du HMS Beagle , ce fut certainement sa terrible prédisposition au mal de mer. En effet, le jeune Charles de constitution fragile, craignait beaucoup ce terrible symptôme qui frappe aussi bien les marins que les passagers lors des périples maritimes. Le 3 décembre 1831, alors qu'il range encore ses affaires dans la cabine de la dunette , il évoque déjà à demi-mots sa crainte du fameux mal. Pour se changer quelque peu les idées, Darwin profite de la présence d'Erasmus, son frère, qui lui tint compagnie avant le départ définitif du HMS Beagle . Mais dès lors que le navire mouilla dans la baie de Plymouth, le mauvais temps ne l'épargna pas complètement, même dans ce havre de paix. Durant la nuit du 3 au 4 décembre, pourtant, le roulis ne semble pas l'incommoder et Charles a " grand espoir d'échapper au mal de mer ". Hélas, le vent du sud redouble de vigueur la nuit suivante, et les nausées apparais

Comment un jeune diplômé de Cambridge devint naturaliste à bord du HMS Beagle

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Fin de l'été 1831, Charles Darwin est un jeune homme de 22 ans. Il achève un parcours scolaire plutôt chaotique et semble enfin avoir trouvé sa voie. Mais une lettre de son mentor le Pr. Henslow va faire basculer sa vie. Revenons quelque années en arrière. Sur la peinture de famille réalisée en 1816, ci-contre, le petit Charles a sept ans. Deux ans plus tard, le décès de sa mère gravement malade va marquer un premier drame familial. Il entre alors dès 1818 au pensionnat de l'école de Shrewsbury, sa ville natale. Mais les études scolaires ne lui plaisent guère, et le jeune élève bien que studieux préfère de loin partir à la chasse, mener de longues promenades dans la campagne environnante et étoffer ses collections d'insectes et de minéraux. Il n'aime guère les mathématiques, ce qu'il regrettera des années plus tard, confessant son aversion pour la discipline et ses difficultés pour la dompter ! A l'âge de 16 ans, soucieux de suivre l'injonction paternelle, i

[1831] Créer des liens d'amitié avec ses futurs compagnons marins

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Partir en mer pendant plusieurs années signifie aussi vivre à bord d'une petite communauté d'hommes, dans un microcosme aux rouages hiérarchiques parfaitement huilés. Mais pour Darwin qui n'est pas marin de métier, cela signifie aussi se faire accepter à bord par le corps des officiers. Pour cela, notre jeune Darwin a plusieurs cordes à son arc. C'est un fils de bonne famille bourgeoise, petit-fils du célèbre à l'époque poète et naturaliste Erasmus Darwin. Il est diplômé en théologie au Christ's College de Cambridge et sa curiosité pour les sciences l'amènent à s'intéresser facilement à la navigation et à la cartographie. Autant de bons présages pour qu'il s'intègre facilement au cercle des officiers. Scène tirée du film Master and Commander (2003) Mais pour cela, il lui faut fréquenter assidument ce petit monde de marins galonnés !  Notre jeune naturaliste eut ainsi la riche idée de ne pas se limiter à seulement suivre le capitaine FitzRoy dans