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Affichage des articles du août, 2023

[1832] Une confusion zoologique marine

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Aussi observateur et consciencieux que fut Darwin au cours de son voyage à bord du Beagle , il n'en était pas moins limité par les connaissances zoologiques de son époque. Aussi notre jeune géologue, malgré son enthousiasme qui le poussait à approfondir continuellement ses connaissances zoologiques en se confrontant au terrain, prenait le risque de commettre quelques erreurs d'identification dans ses Notes Zoologiques . Ce fut probablement le cas pour ces fameux Tuniciers pêchés au large des côtes argentines entre les mois d'août et de septembre 1832. Nous sommes le 30 août 1832. Darwin capture à l'aide de sa nasse de bien curieux Invertébrés qu'il identifie comme appartenant au genre Biphora sp . (genre actuellement refusé, car synonyme de Salpa sp .). Il s'agit selon lui de Tuniciers, de la classe des Thaliacea. Les jours suivants, il capture toujours en pêchant à la nasse de nouveaux spécimens qu'il décrit abondamment. Mais les observations qu'il dét

Leonard Jenyns, le naturaliste qui aurait dû embarquer sur le Beagle à la place de Darwin

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Le 26 août 1832, alors que le temps se dégrade, les officiers doivent reporter leurs relevés cartographiques. Le fond rocheux est poissonneux, aussi l'équipage se livre à une partie de pêche improvisée. Darwin conserve quelques quelques spécimens dans l'alcool et les décrit gastronomiquement dans ses Notes Zoologiques . Nous apprenons ainsi que le Percophis Brasilianus - Percophis du Brésil ou poisson "tête plate" brésilien – est un met de choix au menu de l'équipage. «  Une fois cuisiné, très bon  » précise Darwin. Acanthistius patachonicus et ses rayures sombres sur écailles cuivrées « é tait difficile à manger, mais bon goût  » juge-t-il encore. Et ainsi de suite pour les spécimens pêchés ce jour-ci. Mais pour autant, les noms d'espèces rajoutés en commentaires de l'édition moderne des Notes Zoologiques ne furent pas déterminés par Darwin lui-même. Devant la profusion de spécimens rapportés de son expédition, le jeune naturaliste ne pouvait s'im

[1832] De Montevideo à Bahia Blanca

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Du 19 août au 7 septembre 1832, le HMS Beagle quitte Montevideo en direction de Bahia Blanca, aux portes de la Patagonie. La sortie de la Baie de Montevideo est agitée, une forte brise de Nord-Ouest dévie légèrement le cours des eaux. Résultat au matin, il n'y a que 4 mètres de fond sous la poupe du navire ! Même si le HMS Beagle doit quitter Montevideo dans la journée, il doit changer de mouillage s'il ne veut pas risquer de s'envaser. Mais alors que l'ancre est levée, les vents font dériver le brick-sloop vers une épave ! Grâce à la rigueur des manœuvres de la Royal Navy , le navire évite de peu la collision. «  Adios, barco inglés, adios  » lancent les marins uruguayens depuis le port. Mais la discipline de la marine anglaise brille une fois de plus par sa compétence. Le HMS Beagle évite le naufrage et louvoie pour quitter la baie. Le temps de rejoindre un paquebot anglais pour transférer courriers et paquets, et le Beagle met les voiles. Au soir, une bonne bris

[1832] Une chasse au Capybara

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Désormais que la situation politique s'est pacifiée à Montevideo, Darwin peut entreprendre librement ses randonnées naturalistes dans la campagne environnante. Retournant au Cerro de Montevideo, il entreprend de tirer un Capybara. Ces gros Rongeurs de l'ordre des Rodentia sont des Mammifères semi-aquatiques qui vivent uniquement en Amérique du Sud. Nous laisserons de côté les individus importés au Japon comme animaux d'agrément. Considéré dès les premiers colons espagnols et portugais comme une très bonne source de viande, le Capybara est couramment chassé et sa domestication a même permis le développement de quelques élevages modernes. Capybara, gravure anonyme de 1880. Quant à Darwin, il a bien du mal à abattre sa proie ! «  Après une longue poursuite animée dans une petite baie, je réussis à lui tirer une balle dans la tête  ». Charles Darwin, Journal de Bord . Sa prise est une femelle de 45 kg, mesurant 57 cm au garrot. C'est un spécimen fort respectable, puisque le

Les chaloupes du HMS Beagle

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Le 18 août 1832, c'est une journée calme pour Darwin qui se contente de narrer l'expédition cartographique en baleinière sur l'île des Rats du Capitaine FitzRoy. Voici une occasion de parler des sept embarcations ou annexes transportées à bord du HMS Beagle  ! Commençons avec les baleinières, embarcations à rame principalement, mais on pouvait lever une voile sur l'une d'entre-elles si besoin. Ce que fit le Capitaine FitzRoy pour faciliter sa traversée de la Baie de Montevideo. Évitons tout d'abord les confusions. La baleinière est avant tout un long canot, tel que ceux utilisés par les baleiniers pour harponner leurs prises, mais utilisée durant l'expédition comme embarcation. Ce sont des embarcations effilées, très rapides aux avirons comme à la voile, d'une longueur moyenne de 8 mètres. Au total, le HMS Beagle disposait de quatre baleinières. Un dessin de la section médiane du HMS Beagle en 1832 permet de s'imaginer que deux baleinières étaient

[1833] Darwin et les formations sédimentaires de la Pampa

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Du 16 au 17 août 1833, Darwin quitte le campement du général Rosas sur le Rio Colorado et chevauche en direction de Bahia Blanca. M. Harris, qui ne se sent pas très bien, ne l'accompagne pas pour la suite du périple. Durant cette chevauchée que nous avons présenté dans un billet précédent , Darwin va commencer à étudier plus en détails la géologie de la Pampa. «  Entre le 2ème et le 3ème poste commença l'immense formation géologique qui, je crois, se prolonge jusqu'à Santa Fe, sur une distance d'au moins 600 milles  » Charles Darwin, Journal de Bord . Darwin vient de pénétrer sur une vaste étendue qu'il identifiera par la suite comme appartenant à la formation Pampéenne, une couche sédimentaire du Cénozoïque que lui et le savant français Alcide d'Orbigny furent les premiers à étudier sur le terrain. L'ensemble de ses relevés ainsi que la description des échantillons rapportés de son Voyage permirent à Darwin de rédiger un chapitre entier consacré à cette for

[1833] Un portrait peu flatteur des Amérindiens de la Pampa

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Le 14 août 1833, le temps est infect et Darwin demeure au camp du général Rosas. C'est l'occasion pour lui de décrire les auxiliaires amérindiens de l'expédition militaire de la Campagne du Désert. Darwin évoque pas moins de 600 indiens accompagnant la Colonne de Gauche, celle dirigée par Rosas. Ces alliés, à qui le général a promis des terres en échange de leur allégeance, se retrouvent le plus souvent en première ligne. Une manière cruelle mais efficace pour le rusé général d'éclaircir les rangs de ces alliés de circonstance qui pourraient bien, dans un avenir proche, se retourner contre lui. Famille d'indiens Mapuches d'Argentine. Dessin de Jules Daufresne (1844) Dans son Journal de Bord , notre jeune naturaliste débute par un portrait plutôt noble. Ce sont de grands guerriers, aux traits marqués par la rudesse de la pampa. Mais Darwin, tout à sa hiérarchisation civilisationnelle des peuplades humaines comme il était de coutume chez ses contemporains, ne tard

[1833] Le Général et le Naturaliste

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Le 13 août 1833, Darwin et ses compagnons de route arrivent au campement du général Rosas, le long du Rio Colorado. Cette rencontre constitue un temps fort du voyage du jeune naturaliste en Amérique du Sud. Au point qu'il y revint longuement aussi bien dans son Journal de Bord que dans son Voyage d'un naturaliste autour du Monde . Le général Juan Manuel de Rosas (1793-1877) est alors l'homme fort de la Confédération Argentine, régime politique argentin (1831-1861) succédant aux Provinces-Unies du Río de la Plata. Chef du gouvernement de la Province de Buenos Aires entre 1829 et 1852, Rosas se mit en retrait durant la période 1832-35, espérant que son statut d'homme fort fasse l'unanimité et qu'il soit rappelé triomphalement au pouvoir. Lorsque finalement il reprit les rênes du pouvoir, il instaura un régime autoritaire qui précéda la guerre civile argentine. Durant cet interrègne de trois ans, le Général Rosas s'évertua à se rendre indispensable. La Conféd

[1833] Les salinas du Rio Negro

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De son périple à cheval depuis Carmen de Patagones jusqu'à Bahia Blanca, Darwin rapporte dans son Voyage d'un naturaliste autour du Monde la visite de grands lacs salés à environ 24 km de la ville de départ. Il s'agit des fameuses Salinas qui ponctuent le paysage de la pampa argentine. Ces lacs d'eau saumâtre se remplissent d'eau en hiver, avant de se dessécher en été pour former de grandes surfaces de sel blanc éclatant. Le contraste saisissant entre ces étendues d'évaporites et la pampa aride des alentours attire de nos jours les touristes avides de paysages sauvages saisissants. Mais les Salinas ne sont pas que des curiosités touristiques, elles sont aussi exploitées comme source de sel terrestre. Certaines d'entre-elles sont d'ailleurs riches en lithium, comme au Nord de l'Argentine, provoquant de vives tensions entre les autorités et les défenseurs de l'environnement. Salinas del Gualicho - unviajecreativo.com Mais revenons aux Salinas que

[1833] Excursion à cheval dans la Pampa argentine

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Du 11 au 17 août 1833, Darwin entreprend un voyage à cheval depuis le Rio Negro et la ville de Carmen de Patagonia jusqu'à Bahia Blanca, située à 240 km plus au Nord. Dans ce billet, je vous propose de retrouver les principales étapes de cette excursion. Certaines d'entre-elles font l'objet d'articles détaillés sur ce blog. Les longs séjours en bateau ne sont pas forcément du goût de Darwin, notamment parce qu'il est sujet au mal de mer. Aussi pendant que le HMS Beagle effectue le relevé de la côte argentine, Darwin, entend s'épargner ces monotones journées pour explorer le continent. Le capitaine FitzRoy ne s'y oppose nullement, l'entreprise faisant clairement partie des prérogatives du poste de naturaliste à bord du Beagle . Le 10 août 1833, Darwin prépare donc une excursion terrestre depuis le Rio Negro jusqu'à Bahia Blanca, où il doit retrouver le brick-sloop. La pampa argentine n'est pas totalement sûre en raison de l'hostilité de cert

[1832] Deux surprenants vers plats collectés sur le Cerro de Montevideo

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Dans une lettre adressée au Pr. Henslow, Darwin s'étonne d'une découverte surprenante au sujet de Plathelmintes. «  Je dois dire qu'à mon grand étonnement j'ai trouvé deux Planariæ vivant sous des roches sèches. Je vais demander à L. Jenyns s'il a déjà entendu parler d'une telle observation  » Correspondance du 23 juillet – 15 août 1832 . Nous avons déjà présenté sur ce blog le Pr. Henslow. Quant à Leonard Jenyns, il s'agit d'un naturaliste et homme d'église, beau-frère du Pr. Henslow. Membre de nombreuses sociétés savantes, Jenyns eut notamment la charge de décrire les spécimens de Poissons rapportés de l'expédition du Beagle . Darwin et Jenyns entretinrent des liens d'amitiés de leur vivant, bien que l'homme d'église fut pour le peu secoué par la parution de l' Origine des Espèces . Jenyns reconnut cependant tardivement le génie de Darwin, mais pencha pour sa part en faveur de ce que nous appellerions aujourd’hui le "dessei

[1832] Aux armes, Charles Darwin !

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La journée du 5 août 1832 demeure, à bien des égards, exceptionnelle dans le récit du Second Voyage du Beagle . En effet, ce fut la seule occasion du voyage durant laquelle le HMS Beagle fut directement impliqué dans des manœuvres militaires ! A l'origine de cette prise d'armes, les tensions grandissantes entre les deux usurpateurs qui se disputent le contrôle de Montevideo. Or voilà que situation se dégrade lorsque le contingent de soldats « nègres » du gouvernement rebelle de Montevideo se mutinent à son tour. Le Consul-général britannique craint alors que ses concitoyens de Montevideo soient menacés. A dix heures du matin, le Capitaine du port de Montevideo et M. Dumas, le chef de la police locale, montent à bord du Beagle. Ils sont reçus par le Capitaine FitzRoy, et lui exposent la situation. FitzRoy résume les événements en ces termes : «  Le chef de la police de Montevideo et le Capitaine du port montèrent à bord du Beagle pour requérir assistance pour faire respecte