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Affichage des articles du juillet, 2023

[1832] Birdwatching sur une colline surpâturée

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Le 28 juillet 1832, l'équipage du HMS Beagle a l'autorisation de débarquer au Cerro de Montevideo. Cette colline domine à l'Ouest la baie de Montevideo (132 m d'altitude), lui conférant une importance stratégique de premier ordre. Un phare (1802) d'une hauteur de huit mètres surplombe le monticule granitique. En-dessous du phare, une forteresse militaire fut achevée en 1811. Initialement baptisée Fortaleza del Cerro, elle est également connue sous le nom de Fortaleza General Artigas. Démilitarisée en 1939, le bâtiment accueille désormais le Museo General Artigas. Le site actuel du Cerro de Montevideo (Google Maps) De nos jours, le Cerro de Montevideo est cerné par le développement urbain de Montevideo. Les espaces verts encore visibles sont aménagés en parcs urbains et installations sportives. Darwin s'émerveillait des nombreux passereaux colorés qu'il observa sur les flancs pâturés de cette colline. De nos jours, le site attire-t-il encore les ornithologue

[1832] Les lézards de l'Île des Rats

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La rébellion de Montevideo empêche pour le moment tout débarquement à terre. Aussi le 27 juillet 1832, Darwin et le Capitaine FitzRoy doivent se contenter d'une excursion sur l'île des Rats, dans la baie de Montevideo. Pendant que ce dernier prend des mesures cartographiques, Darwin s'intéresse à l'herpétologie insulaire. Il y remarque un curieux reptile : «  à première vue tout le monde aurait dit que c'était un serpent ; mais deux petites pattes arrières ou plutôt des nageoires indiquent le passage par lequel la Nature relie les Lézards aux Serpent s » Charles Darwin, Journal de Bord . Supposer que Darwin ait observé une espèce de lézards dotée de pattes postérieures natatoires demeure peu crédible. Mais il existe des lézards partiellement ou totalement apodes chez différentes familles de Lépidosauriens qui pourraient correspondre à sa description. Chez les lézards, le caractère apode est une analogie ou convergence évolutive. Cela signifie que différents taxons d

[1832] Les uniformes de la Royal Navy durant le voyage du Beagle

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Le 26 juillet 1832 à 9 heures du matin, le HMS Beagle entre dans la baie de Montevideo. Mais la ville est en proie à l'instabilité ! Deux partis opposés se disputent le contrôle de la ville. Le HMS Druid , - une frégate de classe Seringapatam de 46 canons - est déjà sur place. A peine le Beagle est-il arrivé que le commandant Hamilton leur envoie les signaux suivants : «  Branle bas de combat  » et «  Préparez-vous à couvrir nos embarcations  ». Tout s'éclaira lorsque 6 embarcations lourdement armées de caronades avec 40 fusiliers marins et 100 tuniques bleues à leur bord rejoignent le Beagle . Le commandant Hamilton est venu expliquer en personne au capitaine FitzRoy la situation politique de Montevideo. Et il faut croire que le contexte militaire est des plus tendus pour organiser une telle escorte entre les deux navires ! Hamilton explique une fois à bord qu'un gouvernement militaire illégitime usurpe le contrôle de la ville uruguayenne. Les coups d'état d'A

[1832] Darwin et les Phoques de Lobos

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En route pour Montevideo, Le HMS Beagle tente péniblement de remonter le golfe du Rio de la Plata depuis le 23 juillet. Cet estuaire commun aux Rio Paraná et au Rio Uruguay englobe une superficie de 35600 km². Il s'étend sur 277 km de long pour une largeur croissante de 45 km à 236 km. Au Nord du Rio de la Plata, la côte appartient à l'Uruguay. Au Sud du Rio, c'est l'Argentine. En amont, le Rio Uruguay marque la frontière entre les deux pays. Les conditions météorologiques sur le Rio de la Plata sont changeantes ; ses traîtres courants et la faible profondeur des eaux (11 m en moyenne pour 15 m maximum) en font un golfe particulièrement dangereux pour la navigation. Le 24 juillet, les vents contraires font faire du sur-place au brick-sloop ! Au 25 juillet, une brise légère amène le navire jusqu'à 6 ou 7 milles de Montevideo, l'objectif du voyage depuis Rio de Janeiro. Le lendemain 26 juillet 1832, le HMS Beagle entre enfin dans la baie de Montevideo vers 9 heu

[1832] L'équipage du HMS Beagle

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«  Ce soir, je me suis procuré le rôle des quarts et comme vraisemblablement notre équipage sera le même pour le reste du voyage, je vais le recopier  » Charles Darwin, Journal de Bord (24 juillet 1832). Cette entrée du Journal correspond à une des précieuses versions de l'équipage à bord du HMS Beagle . Elle compte, selon Darwin, 76 âmes à bord. Il ne s'agit pas de la seule liste disponible. Dans l'Annexe 1 de l'article « Un voilier nommé Désir » (Tort, P & Rouquette, C. ; 2012), Patrick Tort a compilé les différentes listes d'équipage entre 1831 et 1836 et discuté leurs incohérences comme leurs lacunes. Ce présent billet n'a nullement l'objectif de retranscrire cette précieuse Annexe, mais de recopier la liste proposée par Darwin dans son Journal de Bord au 24 juillet 1832 : Augustus Earle (1836) : " Divine service as it is usually performed on board a British frigate at sea " Seconds maîtres de l'équipage : J. Smith W. Williams Quart

[1832] Les Marsouins de Darwin

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Le 18 juillet 1832. Le HMS Beagle avance à la vitesse de 8-9 nœuds (14,8 – 16,7 km/h). Un banc d'une centaine de marsouins passe en travers de la proue du navire. «  Un extraordinaire banc de Marsouins, plusieurs centaines au moins, a coupé la route du navire  » Charles Darwin, Journal de Bord . Cette nouvelle observation de Mammifères marins nous offre une nouvelle occasion de tenter d'identifier quelle espèce croisa le sillage du HMS Beagle au large des eaux brésiliennes ! Le HMS Beagle et un groupe de Mammifères marins. Illustration de Robert Taylor Pritchett (1890). Notez qu'il dessine le banc de Cétacés, avec en second plan la poupe du HMS Beagle , alors que Darwin évoque au 18 juillet 1832 l'observation de Marsouins en travers de proue. Pouvons-nous identifier l'espèce observée, comme nous l'avons fait lors du précédent billet consacré aux Globicéphales ? Hélas non, cette fois-ci la tâche ne sera pas aussi aisée. Car dans son Journal de Bord, Darwin n

[1832] Grampus en vue !

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Le 15 juillet 1832, Darwin rapporte dans son Journal de Bord l'observation au large d'un grand groupe de « Grampus » qui escortent le HMS Beagle sur quelques miles. Mais de quels animaux marins fabuleux nous parle-t-il ? Tout simplement des Cétacés ! Dans le vocabulaire des marins de l'époque, le terme de "Grampus" désigne différents Mammifères marins. Mais il semble que le terme soit surtout repris pour désigner des Orques ou des Dauphins de Risso. Pour cette seconde espèce, le nom de genre ( Grampus sp .) est d'ailleurs tiré de cette expression. Grampus (Dauphin de Risso) - gravure de 1863 Mais d'où vient ce terme de Grampus ? Il s'agit de la contraction de deux mots latins : " grandis piscis " (grand poisson). Comme vous le savez certainement, les Cétacés sont en réalité des Mammifères, mais ce détail zoologique ne souciait guère les marins du XIXème siècle. « Grampus » peut donc désigner différentes espèces. D'après le Journal de Bo

[1833] Une Goélette se joint au service du Beagle

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Entre les 15 et 17 juillet 1833, l'équipage organise une petite cérémonie de baptême en l'honneur de la Goélette Adventure , anciennement l' Unicorn . Il s'agit alors de fêter dignement l'ajout d'un navire de conserve (un « compagnon de route » en quelque sorte) au HMS Beagle . Et quoi de mieux, pour baptiser un navire explorateur, que de le nommer Adventure , en souvenir du navire-amiral lors de la première expédition du Beagle , ou encore du nom d'un des navires du Capitaine Cook ? Mais revenons sur l'histoire de cette Goélette. Fin mars 1833, alors que le HMS Beagle fait escale aux îles Malouines, arrive à Port-Louis en piteux état une Goélette phoquier américaine, " The Unicorn ". So co-propriétaire, le Capitaine Lowe, a dépensé l'intégralité de sa fortune pour armer ce navire et espérer réaliser une belle saison de chasse en mer. L'homme n'en est pas à sa première campagne, cela fait vingt ans qu'il est phoquier. Mais les

Une billet sur @Voyage_Darwin dans La Recherche !

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Le magazine La Recherche n°574 (juillet-septembre 2023) consacre un billet à mon travail sur le Voyage de Darwin ! Merci à la rédaction pour cet éclairage estival. Et bonne découverte du compte twitter et de ce blog si vous les visitez suite à cette manchette !

[1832] Un Pigeon nommé Pétrel

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Difficile de voyager à bord d'un voilier lorsqu'on est sujet au mal de mer ! Le 11 juillet 1832, le HMS Beagle poursuit son périple depuis Rio de Janeiro en direction de Maldonado. Darwin s'est senti nauséeux durant ces derniers jours, aussi se désole-t-il d'avoir certainement raté de nombreuses observations naturalistes depuis le large. «  Plusieurs baleines ont été aperçues. Je me contentai de jeter un regard à l'une d'elles, mais, à cela même, mes yeux injectés de bile ne trouvèrent que peu d'intérêt  ». Charles Darwin, Journal de Bord . Pour autant, Darwin remarque péniblement que des Pétrels n'ont de cesse de suivre le sillage du Beagle. Dont parmi eux, le « Pigeon du Cap ». Il ne s'agit pas d'un Columbidé, bien entendu, mais d'un Procellariidé présent dans l'Hémisphère Sud. Autrefois nommé Pétrel du Cap, le Damier du Cap ( Daption capense ) est un oiseaux marin exceptionnel. Comme tous les oiseaux pélagiques, il présente des adapt

[1833] Le récit du HMS Black Joke

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Le 8 juillet 1833, Darwin relate dans son Journal de Bord un épisode à bord qui bouleverse l'équipage du Beagle . L' Unicorn , Goélette achetée aux îles Malouines par le capitaine FitzRoy afin d'épauler le Beagle dans sa mission cartographique, est actuellement en réfection à Maldonado. Lorsqu'on découvre que se cache parmi son équipage un authentique pirate ! En effet, l'un des seconds maîtres d'équipage aurait appartenu au Presidenté , un navire pirate qui combattit contre le vaisseau de guerre HMS Black Joke et massacra les passagers du paquebot Redpole . Sans plus attendre, le capitaine FitzRoy a décidé de livrer cet homme comme prisonnier au Consul de Montevideo. Aussi, peu avant minuit, le HMS Beagle fit voile vers la proche ville uruguayenne. Cette anecdote se place au centre du conflit naval qui opposa la Royal Navy aux contrebandiers négriers. L'Angleterre abolit la traite négrière en 1807. Sous l'impulsion franco-britannique, le Congrès de

[1832] Départ de Rio de Janeiro

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Du 5 au 25 juillet 1832, le HMS Beagle reprend la mer en direction de Maldonado. Ce seront les premières aventures de Darwin en Uruguay ! Le trajet fut une occasion supplémentaire d'étudier la biologie marine, et en particulier les Cétacés. Après un adieu au Pain de Sucre encore visible depuis le navire au 6 juillet 1832, le temps se montre capricieux et la houle ravive le mal de mer de Darwin. Retour au calme le 10 juillet, pour mieux essuyer un vent fort. La météo n'est guère meilleure les jours suivants, mais Darwin parvint tout de même à relever quelques observations naturalistes sur lesquelles nous reviendrons ultérieurement. Au 13 juillet 1832, les officiers ont définitivement rangé leurs rasoirs, puisque tous arborent une barbe aussi sauvage que les contrées qu'ils approchent. Les températures baissent progressivement, alors qu'ils descendent dans l'Hémisphère Sud. Durant la journée du 20 juillet, Darwin note que le vent devient froid alors que les eaux frai

[1832] La face sombre de la société brésilienne

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En ce 3 juillet 1832, le HMS Beagle est encore à Rio de Janeiro. Le départ pour Maldonado n'aura lieu que le 5 juillet au matin. Aussi pour patienter avant que le brick-sloop ne reprenne le large, Darwin profite de cette journée pour effectuer une dernière promenade et déambuler dans les rues de Rio de Janeiro. Mais les terribles inégalités de la société brésilienne frappent son attention une nouvelle fois. Darwin a été tout au long de son séjour au Brésil bouleversé par le sort des esclaves. En cette première moitié du XIXème siècle, l'esclavage joue un rôle primordial dans l'économie brésilienne. Si la traite négrière est officiellement interdite, la contrebande en mer est massive et les marines européennes peinent à l'endiguer. Le Brésil n'abolira l'esclavage que le 13 mai 1888, six ans après le décès de Charles Darwin. C'est pourquoi tout au long de sa vie, Darwin conserva de ses séjours brésiliens une image particulièrement négative de cette société d