[1832] Une promenade le long de la Citadelle de Montevideo

Le 29 octobre 1832, Charles Darwin se promène le long des fortifications de Montevideo. Et s'il déplore que les lieux servent désormais de dépotoir d’équarrissage, notre jeune naturaliste cherche avant tout à retrouver sur place les traces d'une des plus grandes victoires britanniques en Amérique du Sud.

Le siège de Montevideo est, pour nous autres francophones, un épisode fort méconnu des guerres napoléoniennes. Nous avons coutume de placer le théâtre d'opération en Europe, mais nous oublions que le conflit fut quasiment mondial. Les Britanniques espéraient en profiter affaiblir les possessions espagnoles en Amérique Méridionale. Une vieille obsession qui n'avait jamais véritablement abouti au XVIIIème siècle. Cette fois-ci, la couronne anglaise entendait s'en prendre à la Vice-royauté du Río de la Plata. Entre 1806 et 1806, les Britanniques lancèrent deux phases d'invasion visant Buenos Aires et Montevideo. La première phase de 1806 est marquée par l'occupation victorieuse de Buenos Aires pendant 46 jours, avant que les troupes espagnoles ne parviennent à chasser les Britanniques de la capitale de la Vice-Royauté.


Détails de la chute de la Citadelle de Montevideo, par E. F. Burney (1760-1848)


La seconde phase d'invasion, en 1807, débute par la rapide capture de Montevideo avant de poursuivre sur Buenos Aires. Elle mobilise beaucoup plus d'hommes : près de 6000 soldats côté britannique, contre 5000 défenseurs (soldats réguliers et miliciens). Le 20 janvier 1807, une première bataille eut lieu aux abords de la ville. La victoire britannique permet de verrouiller l'accès à Montevideo par voie terrestre. Le siège de la cité commence ensuite. Les britanniques doivent absolument capturer la puissante Citadelle qui domine Montevideo. Pendant plusieurs jours, l'artillerie pilonne la place forte. Une brèche est percée entre deux bastions. Le 3 février, vers 2 heures de matin, l'infanterie lance l'assaut. Les pertes britanniques sont lourdes alors que les soldats tentent de localiser la faiblesse des murailles. Les actes héroïques se succèdent. L'avant-garde britannique parvient à percer les défenses, et des combats acharnés se poursuivent dans la Citadelle. Pendant ce temps, une seconde force d'attaque attend à la porte de San Pedro, seconde entrée de la ville placée au Sud des remparts. Les troupes ne peuvent cependant s'exposer tant que la Citadelle n'est pas prise, sinon le feu croisé des défenseur les décimerait. Mais entendant les clameurs de la bataille, les assaillants s'élancent par surprise et escaladent les murs de la ville ! Ils bousculent les défenseurs, la cité est prise.

La victoire de Montevideo était une course contre la montre, les Espagnols ayant dépêché en urgence des renforts depuis Buenos Aires. Les troupes britanniques réalisent un impressionnant exploit militaire en contrôlant la ville en quelques heures. A l'aube, il répriment sévèrement tout pillage. Vers 8 heures du matin, les commerces rouvrent et les habitants vaquent à leurs occupations comme si de rien n'était. La ville va rester sous contrôle britannique jusqu'en septembre 1807. Entre-temps, le second assaut contre Buenos Aires de juillet 1807 se solde par un échec cinglant. Le corps expéditionnaire capitule. Les Britanniques ont perdu tout espoir de contrôler le Rio de la Plata et abandonnent leurs positions si durement acquises.

L'échec des invasions britanniques sur le Rio de la Plata va cependant porter un coup fatal et inattendu à l'Empire espagnol. Forts de leur succès à Buenos Aires, les miliciens locaux armés par la Vice-Royauté s'estiment capables d'assurer leur propre défense. Tandis qu'en Espagne, Napoléon renverse dès 1808 la monarchie des Bourbons et place sur le trône son frère Joseph Bonaparte. Les conditions sont réunies pour que l'Argentine réclame son indépendance. La Révolution de Mai éclate à Buenos-Aires en 1810. Elle sonne le glas de la Vice-royauté du Río de la Plata et de la domination espagnole en Amérique du Sud.

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