[1834] Excursion en canots sur la côte orientale de Chiloé (3/4)

Poursuivons le récit de l'exploration en canots de la côte orientale de Chiloé. Le 29 novembre 1834, la petite expédition atteint Castro, l'ancienne capitale de Chiloé. La cité, en partie abandonnée après le transfert administratif, présente un curieux aspect. La plaza est recouverte d'herbe que broutent des moutons. Une église jésuite en bois s'élève, tel un fantôme au-dessus des rues vidées de leurs habitants. Le Gouverneur local est un paysan du cru, vieil homme tranquille chargé de la troisième plus ancienne cité européenne du Chili.

Fondée le 12 février 1576, la ville de Castro connut plusieurs malheurs au cours des siècles. En 1642, elle tombe temporairement sous la coupe du corsaire néerlandais Hendrik Brouwer. En 1767, elle perd son statut de capitale de Chiloé en faveur d'Ancud. En 1837, un tremblement de terre ravage la belle endormie. Ce n'est qu'après l'inauguration de la ligne de chemin de fer en 1912 que Castro connaît un nouvel essor. Son développement n'est contrarié que par l'incendie du 10 décembre 2021 qui ravage une partie de l'espace urbain. La ville compte aujourd'hui près de 40 000 habitants.


Palafitos de Castro. Sources : Wikipedia


Castro est célèbre pour ses palafitos, des maisons traditionnelles en bois sur pilotis typiques de l'île de Chiloé. Les capillas ou chapelles en bois fleurissent alors dans le moindre hameau insulaire. Darwin ne manque pas de décrire celle de Castro en des termes élogieux., malgré son aspect fantomatique dans cette ville en alors en grande partie désertée. Poursuivant leur périple au 1er décembre, les marins passent l'île de Lemuy sur laquelle ils rencontrent de nombreux Amérindiens christianisés. L'état de pauvreté et d'isolement de ces peuplades est tel que l'argent n'a pas de valeur sur place. Tout se troque, surtout le tabac et la poudre à canon. Les armes à feu sont si rares que chaque paroisse possède son mousquet public, qui sert surtout les jours de fête religieuse pour tonner en l'honneur du saint local.

Malgré la gentillesse des locaux, les lieux ne sont pas sûrs, et chaque nuit le campement de nos explorateurs britanniques est gardé par des sentinelles armées. Malgré cette prudence digne des terres les plus sauvages d'Amérique du Sud, les paysages grandioses valent nettement l'expédition pour Darwin. Géologisant au fil des escales, s'intéressant à la faune et la flore de l'estran, il a le souffle coupé dès lors que pointent à l'horizon les cônes volcaniques des Andes. Nul doute que cet épisode du Voyage le fascina grandement !


Excursion en canots sur la côte orientale de Chiloé (24 nov. - 7 déc. 1834)


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