[1832] Le HMS Beagle arrive au Cap-Vert

Le 15 janvier 1832, le Beagle arrive dans l'archipel du Cap-Vert. Une brume épaisse chargée de poussière cache aux yeux de l'équipage les beautés de ces îles. Le capitaine FitzRoy note même qu'il rate de peu son itinéraire en se déportant trop à l'Ouest, faute de visibilité correcte ! Jusqu'au lendemain 16 janvier 1832 lorsque le Beagle arrive à Porto-Praya (aussi orthographié Port-Praia), le port de la ville de Praia, et capitale du Cap-Vert située sur l'île de Santiago. Le brick-sloop et son équipage vont rester au Cap-Vert pendant près d'un mois, le capitaine FitzRoy ayant pour mission d'y effectuer des mesures cartographiques ainsi que des expériences sur le magnétisme terrestre.


Carte de l'Amirauté britannique de Port-Praia (Porto-Praya), 1813.


L'arrivée à Port-Praia est un événement important, puisqu'il s'agit de la première véritable escale du Beagle. Aussi, chacun se livre dans ses récits de voyage à dresser un premier tableau de l'île de Santiago « Les environs de Port Praya offrent peu de choses qui soient agréables à l'œil d'un visiteur ordinaire, mais assez intéressantes pour un géologue. Un pays désolé et vallonné, brûlé par le soleil et pierreux, avec peu d'arbres même dans les vallées, et ceux-là seuls les troncs flétris et fantomatiques de vieux palmiers, entoure le port » FitzRoy, Narratives.

Les souvenirs de Darwin ne sont guère plus favorables, le naturaliste s'alarmant du paysage désolé qui s'ouvre à ses yeux : «  Vu de la mer, le voisinage de Porto-Praya offre un aspect désolé. Les feux volcaniques du passé, de la chaleur brûlante d'un soleil tropical ont, presque partout, rendu le sol impropre à supporter la moindre végétation » Darwin, Voyage d’un naturaliste autour du monde. Pour Darwin, il ne faut pas chercher bien loin les véritables raisons de ce paysage aride et quasiment mis à nu. « C’est à peine si l’on peut découvrir une seule feuille verte dans toute l’étendue de ces immenses plaines de lave ; cependant des troupeaux de chèvres et quelques vaches parviennent à trouver leur subsistance dans ces lieux désolés ». L'île de Santiago, comme il l'écrit lui-même dans son récit de voyage (op. cit.), était autrefois recouverte d'une vaste forêt. Mais les premiers colons ont déboisé avec tant d'insouciance et soumis les terrains nus à une telle pression pastorale qu'il ne subsiste que quelques forêts buissonnantes, reliques perdues dans quelques vallées encaissées.

Le climat du Cap-Vert est chaud et aride. En janvier, les températures sont comprises entre 20-25°c pour un air sec (humidité à 65 %) et quasiment aucune précipitation (5 mm en moyenne). De plus, le Beagle arrive au cours une saison sèche particulièrement sévère, puisque Darwin en prend même note dans son récit de voyage ! Le choc est donc saisissant pour tout voyageur anglais venant de quitter, trois semaines plus tôt, les vertes et humides côtes de sa nation d'origine. Pour autant, l'île de Santiago n'est pas un paysage totalement mort sous la pression anthropique, et Darwin va pouvoir y faire quelques observations intéressantes dans les jours prochains.

Enfin, les historiens maritimes se souviendront certainement que le nom de Porto-Praya ne nous est pas totalement inconnus. Il s'agit bien du cadre de l'affrontement maritime qui opposa le 16 avril 1781 les flottes royales françaises et anglaises ! Le bailli de Suffren, commandant alors une flotte de cinq navires de lignes, fait voile vers la colonie hollandaise du Cap de Bonne-Espérance en Afrique du Sud. Il espère y arriver avant que les anglais n'y débarquent et compromettent la route vers les Indes orientales. Et pour cause ! L'amiral Johnstone avait quitté l'Angleterre le 13 mars 1781 à la tête de cinq navires de ligne, avec pour ordre de s'emparer de la colonie hollandaise du Cap. Les deux flottes s'affrontent devant Port-Praia au 16 avril 1781. Et si l'issue du combat fut incertaine, les français parvinrent à maintenir leur avance tout en forçant les anglais à renoncer. Arrivés les premiers au Cap, la flotte française empêcha les anglais d'y débarquer. Aussi le raid de Suffren demeure une belle victoire stratégique française !


Commentaires

Articles les plus consultés en ce moment :

[1833] Le mauvais temps contrarie les projets de Darwin

[1833] Des îles Malouines jusqu'au Rio Negro

Darwin et la géologie des îles Malouines