[1834] Retrouvailles avec un camarade d'enfance

Profitant de cette nouvelle escale chilienne, Darwin prend ses quartiers à Valparaiso. Le 2 août 1834, il s'installe chez M. Corfield. « Je demeure pendant tout ce temps chez M. Corfield et je ne saurais dire toutes les bontés qu’il a eues pour moi » Charles Darwin, Voyage d’un naturaliste autour du Monde. Pour autant, il ne s'agit pas d'un concitoyen inconnu de Darwin, puisque Richard Henry Corfield était en dernière année à l'école de Shrewsbury lorsque ce dernier, alors petit garçon, y entra.


Panorama de Valparaiso, par Ernest Charton (1860) 


Les deux enfants devaient bien se connaître, malgré la différence d'âge laissant à penser qu'ils ne furent pas de très proches camarades de jeu. Corfield est assez connu de la famille Darwin pour que Charles fasse part de ces retrouvailles à sa sœur Caroline: « J’y rencontrai Corfield, qui montre de l'admiration pour les beautés de la nature sous la forme des Signoritas, tandis que j’espère l'admirer dans les Andes » Correspondance de Charles Darwin à Caroline Darwin, 9–12 August 1834. Darwin et Corfield se reconnurent, et c'est tout naturellement que les deux natifs de Shrewsbury se fréquentèrent amicalement. Et même si leurs centres d'intérêt divergeaient quelque peu, Darwin eut visiblement plaisir à loger chez son ancien camarade d'école. Pour son plus grand salut, puisque son séjour à Valparaiso fut également marqué par une première crise majeure de la maladie qui devait l'affecter toute sa vie.

A Valparaiso, M. Corfield exerçait la profession de marchand maritime spécialisé dans l'importation de produits britanniques. Il habitait une belle demeure, dans le quartier commercial de El Almendral. Lorsque Darwin quitta définitivement la ville, Corfield avait l'intention de retourner en Angleterre et d'y lancer une nouvelle entreprise. La Correspondance de Darwin compte deux lettres, adressées en Juin 1835 et en Juillet 1835 ; nous ignorons s'ils restèrent en contact après ces dates.

Que devint Richard Corfield ? De retour en Angleterre, il épousa le 15 février 1838 une dénommée Mary Smith, à Exeter. Finies, les jolies "Signoritas" chiliennes ! Ses affaires chiliennes se poursuivirent un temps avec la collaboration d'un autre expatrié anglais, M. Alison. En 1840, un avis publié dans la London Gazette annonçait que la société Corfield, Alison, & Co. Avait été dissoute le 31 octobre 1839 à la fois à Valparaiso et à Londres. Peut-être eut-il bon nez, car la firme désormais rebaptisée "Alison, Cumberlege & Co" fit faillite en 1847 ! Un mot rapide sur ce M. Alison ; ce marchand anglais de Valparaiso assista lui aussi Darwin dans ses recherches géologiques. Après ses entreprises infructueuses d'import-export, M. Alison devint le directeur de la compagnie d'exploitation de gisements de cuivre Compañía Chilena de Fundiciones en 1856.

Mais revenons à M. Corfield. Nous savons qu'il eut un fils baptisé lui aussi Richard ; et une fille baptisée Elinor. En 1861, il était déclaré exerçant la profession de marchand à Newton, Lancashire. Il poursuivit ces activités commerciales jusqu'à sa retraite. Enfin en 1881, l'ancien camarade d'école de Darwin vivait avec sa femme, sa fille et son gendre. Il décéda le 6 avril 1897 à Llangattock, Pays de Galles, à l'âge de 93 ans. Racontait-il à ses petits-enfants ses souvenirs chiliens lorsqu'il hébergea le célèbre Charles Darwin ?

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