[1834] Les Oiseaux de Chiloé

Durant son premier séjour sur l'île de Chiloé, en juillet 1834, Charles Darwin rapporta dans ses Notes Zoologiques différentes observations ornithologiques. Il captura également différents spécimens ; l'ensemble de ces données ayant été analysées par John Gould dans la Zoologie du voyage du H.M.S. Beagle.

Le Tourco rougegorge ou Chucao (Scelorchilus rubecula), initialement décrit sous le nom binominal Pteroptochos rubecula, est un habitant des forêts humides du Chili central. Il a beau vaguement ressembler à un Rouge-gorge comme l'affirment alors les officiers du Beagle, ce passereau n'est un rien un Turdidé (pardon, désormais notre rouge-gorge familier est classé parmi les Muscicapidés), mais un Rhinocryptidé. Selon les superstitions locales, son chant peut amener la chance ou la malchance. Ayant deux chants différents, il suffit d'entendre l'un ou l'autre pour que la superstition fonctionne – ou non ! Clin d'œil au rival naturaliste de Darwin, le Chucao fut aussi décrit dans le Voyage dans l'Amérique méridionale d'Alcide d'Orbigny (1847).


Scelorchilus rubecula. In : Voyage dans l'Amérique méridionale, d'Orbigny (1847)

Le Tourco huet-huet (Pteroptochos tarnii) est également très abondant sur l'île. Il s'agit aussi d'un Rhinocryptidé. Présent dans la partie méridionale du Chili, cet oiseau forestier fut décrit pour la première fois par le Capitaine Phillip Parker King, commandant de la Première Expédition du HMS Beagle en Amérique du Sud. Nous le retrouvons également dans l'ornithologie du Voyage dans l'Amérique méridionale d'Alcide d'Orbigny (1847).

Darwin note aussi la présence d'un Fringillidé, le Le Diuca gris (Diuca diuca) alors décrit sous le nom scientifique de Fringilla diuca. Aujourd'hui classé parmi les Thraupidés, ce passereau des milieux forestiers et semi-ouverts est présent en Patagonie chilienne et argentine. Il s'agit, selon Darwin, de l'oiseau le plus commun sur l'île. Peut-être fait-il référence à son comportement grégaire en hiver, qui le pousse à se rassembler en petits groupes familiaux.

Croisant plusieurs espèces de Colibris, Darwin nous en rapporte une identification trop imprécise pour correctement associer l'espèce aux guides ornithologiques contemporains. Néanmoins, insatiable curieux de sciences, il ne manque pas de s'intéresser à l'alimentation de ces fascinants oiseaux. Doutant sérieusement que le nectar des fleurs soit le seul aliment des Colibris, il dissèque un spécimen et découvre dans son estomac un fluide jaunâtre dans lequel baignent de minuscules fragments de Diptères (de minuscules mouches). Il devient évident pour lui que les Colibris ont un régime alimentaire mixte, ce qui expliquerait selon lui leur persistance à Chiloé en cette mauvaise saison. Plus tard à Valparaiso, il réitérera ses dissections et enrichira la liste des Insectes consommés, notamment des fourmis. Enfin, les Colibris au dimorphisme sexuel très prononcé servirent également d'exemple à la sélection sexuelle lors des travaux postérieurs de Darwin.

Enfin, s'ajoutent à cette liste divers autres oiseaux cités de manière plus anecdotique : Condors, Urubu à tête rouge (que Darwin nomme le Carrancha), Pics, Becs-en-ciseaux noir (Rynchops niger) … Soit une avifaune assez diversifiée pour cette période hivernale, et sans que notre naturaliste ne bénéficie d'équipements optiques contemporains afin d'enrichir ses coches !

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